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Malgré des politiques répressives pour empêcher les départs de Libye, le flot des naufrages ne tarit pas
Selon l’Organisation internationale des migrations, près de 3 000 personnes sont mortes en tentant la traversée de la Méditerranée depuis janvier 2017. Or avec 55% des décès de personnes migrantes dans le monde, la route migratoire la plus fréquentée – et la plus mortelle – demeure sans équivoque la Méditerranée centrale, entre la Libye et l’Italie. C’est là que l’Aquarius, le navire affrété par SOS MEDITERRANEE et opéré en partenariat avec Médecins sans frontières, poursuit les sauvetages en mer en dépit de la complexification du contexte. En 2017, le nombre d’opérations de sauvetages effectués par les équipes de l’Aquarius a été multiplié par deux. La Méditerranée centrale concentre les 3/4 des traversées dans la région depuis le début de l’année, bien loin devant les axes Afrique du Nord/ Espagne, ou Turquie/Grèce.Avec l’hiver et la baisse annoncée des navires de sauvetage présents en mer, la poursuite de notre mission est complexe mais reste primordiale face à l’urgence humanitaire.
Le chaos qui règne en Libye n’est pas étranger à l’afflux des migrants dans cette zone. Citant les exactions multiples – viols, torture, détention arbitraire, travaux forcés, prostitution… – dont sont victimes les milliers d’hommes, de femmes et d’enfants qui s’y retrouvent captifs dans des camps de détention, le Haut Commissariat pour les droits humains de l’ONU a récemment fait savoir que « La souffrance des migrants détenus en Libye est un outrage à la conscience de l’humanité », estimant que la situation était devenue « catastrophique ». Cette situation, SOS MEDITERRANNEE la dénonce depuis sa création, sur la base des témoignages des quelque 25 000 personnes qu’elle a secourues depuis mai 2016 et qui affirment tous avoir préféré braver la mort en mer plutôt que de rester dans cet enfer libyen… « Les hommes sont vendus entre 325 et 3250 euros selon ce qu’ils savent faire… Les femmes entre 150 et 1500 euros. Elles sont abusées, violées… quand je parle des femmes, j’inclus de très très jeunes filles » raconte Sofiane, un Nigérian de 40 ans.
Rester mobilisés : une question de vie ou de mort
La vice-présidente de SOS MEDITERRANEE international, Sophie Beau, continue de dénoncer l’attitude de l’Europe face à cette crise humanitaire en mer. « Les Etats européens ne peuvent laisser la charge du sauvetage à des ONG comme la nôtre ou aux navires se trouvant dans la zone de détresse ; ils ne peuvent non plus sous-traiter leurs responsabilités auprès de groupes armés non identifiés – ceux qui se présentent aujourd’hui dans les eaux internationales comme des ‘garde-côtes libyens’, qui menacent les personnes en détresse et les ramènent de force dans le circuit des violences libyennes. C’est une véritable flotte de sauvetage européenne qu’il faut mettre en place, dans le respect absolu des conventions maritimes et du droit international. » En attendant, l’Aquarius poursuit sa mission et doit mobiliser pas moins de 11 000 € par jour, une somme jusque-là amassée à 98% par la société civile !
« La lutte que mène SOS MEDITERRANEE pour faire reconnaître la nécessité de sauver ces vies humaines à la dérive, c’est la lutte d’une intelligence magnifique contre la bêtise institutionnelle », lançait Daniel Pennac lors de l’Appel du 8 juin de l’association l’été dernier à Marseille. « SOS MEDITERRANEE, ça doit être nous, chacun de nous, personnellement », précisait-il en référence à la mobilisation des citoyens européens qui ont fait naître et continuent de soutenir l’association de sauvetage en mer plutôt que de se résoudre à être les spectateurs silencieux d’un des plus grands drames de notre époque.